Portrait de Vésale extrait de "De humani corporis fabrica"
" L’anatomie devrait absolument être considérée comme
la seule base solide de tout l'art de la médecine"
Vésale (1543)
Au 16ème l'anatomie repose sur les textes anciens et la
pratique est exceptionnelle.
L'église contrôle l'accès aux dépouilles (suppliciés) et
interdit de démembrer les cadavres en vue de les transporter ou de les
conserver.
Les premières dissections auront lieu fin 13ème début 14ème
dans les universités de Paris et de Bologne.
Elle interdit également aux médecins de faire couler le
sang et la profession de chirurgien se différencie de celle de médecin.
Cette pratique sera longtemps négligée.
L'histoire va montrer que le rapprochement entre l'anatomie
provenant des artistes (Léonard de Vinci, Vésale, Verrocchio), de la médecine
et la chirurgie a été prolifique pour le progrès médico-chirurgical.
La chirurgie : une pratique négligée
L'ignorance anatomique et chirurgicale des
médecins critiquée par Vésale
Difficulté de la pratique
La chirurgie est un ensemble d'opérations manuelles et
instrumentales réalisées sur et dans un corps vivant à des fins thérapeutiques.
C'est l'un des plus anciens arts médicaux. Son efficacité a été très longtemps
limitée par quatre facteurs :
·
L'ignorance de
l'anatomie et de la physiologie : sans connaissance précise de l'organisation
intérieure du corps et de son fonctionnement, les interventions ne pouvaient
porter sur les organes vitaux et se limitaient aux organes périphériques et aux
plais.
·
L'hémorragie, souvent
mortelle.
·
La douleur, entrainant
des réactions motrices
·
L'infection, qui
causait de nombreux décès
Le souci de la forme interne humaine
Vésale va critiquer les médecins contemporains qui ne se préoccupent
pas des maladies internes. Il va réhabiliter la chirurgie en la considérant
comme son arme primordiale car pour lui le rôle des médecins doit être plus
complet.
Le progrès de la chirurgie influencé par
la collaboration artiste-anatomistes
L'impératif de l'observation de l'homme
La chirurgie peut être définie par la pratique du soin par
l'usage des mains : vient du grec (kheirourgia) (kheir) [mains] et (ergon)
[travail]. Cette pratique existe depuis la Préhistoire avec la pratique de la
trépanation, et a considérablement évolué au fil du temps.
Le développement et les progrès de la chirurgie ont été
influencés par de nombreux événements. L'imprimerie va faciliter la diffusion,
mais surtout la collaboration des artistes avec les anatomistes et le monde
médical va rendre très performantes les représentations anatomiques.
Une progression difficile
Mais pendant très longtemps les chirurgiens ont été
relégués dans une caste inférieure parmi les soignants, et leurs exclusion des
études médicales a été très néfaste pendant plusieurs siècles.
En occident, au Moyen Age, les médecins sont des clercs et
non des laïcs. Certains occupent même de hautes fonctions ecclésiastiques. Le
mariage leur étant interdit par l'Eglise, ils ne peuvent donner des soins aux
femmes (d'où la nécessité de sages-femmes et d'accoucheurs). De plus, ils ne
peuvent exercer la chirurgie car « Ecclesia abhorret a sanguine »
(l'Eglise a horreur du sang). Et enfin, un médecin n'a pas le droit d'exercer
une profession manuelle pour en tirer profit. Pour cette raison, les actes
chirurgicaux leur sont aussi interdits.
Ceux-ci sont donc assurés par les barbiers, qui en plus des
coupes de cheveux, des bains et des étuves, traitent les plaies, incisent les
abcès, pratiquent les saignées... après diagnostic d'un médecin.
La réhabilitation de la chirurgie par
Louis 14
En France au 17ème, la chirurgie connait un double
bouleversement. En 1660, la Confrérie de Saint-Côme est dissoute suite à la
perte du Procès face à la Faculté de médecine de Paris. Les chirurgiens n'ont
alors plus le droit d'exercer la médecine.
La pose de ventouses est du ressort de la matrone et celle
du clystère de l'apothicaire.
Un regain de crédibilité des chirurgiens
L'opération déclic : La fistule anale de Louis 14
Lorsque Marie-Thérèse d'Autriche, l'épouse de Louis 14, a
un abcès à l'aisselle, Daquin, médecin du roi, s'opposa à ce que Dionos, le
chirurgien, pratique une incision, ce qui aurait empêché l'abcès de s'ouvrir
dans la poitrine. La reine en meurt.
Puis Louis 14 est atteint d'une fistule anale en 1686, ses
médecins lui prescrivent comme traitement la saignée et le clystère (lavement)
mais les tentatives médicales ne donnent aucun résultat.
Il fait alors appel à son premier chirurgien royal, Charles
François Felix Tassy qui le guérit, ce qui permet de redonner un crédit aux
chirurgiens par rapport aux médecins. Le Roi guéri va faire regagner à la chirurgie
sa crédibilité.
Querelle avec les barbiers
Jean Pitard, un barbier renommé, obtient du prévôt de
Paris, Etienne Boileau, l'autorisation de former une corporation indépendante,
sous la direction de six jurés, afin de faire passer des examens à tout barbier
désireux de pratiquer la "cyrurgie". C'est une levée de
bouclier de la corporation des barbiers et de la Faculté de médecine, sous la
direction de son doyen, Guy Patin.
Un arrêt de 1660 annule la création de la corporation des
chirurgiens.
Lesquels demandent à revenir dans la corporation des
barbiers et à se soumettre au premier barbier du roi, Retz de Villeneuve.
Mais Louis 14 s'y oppose et exige que ce soit Félix Tassy,
son premier chirurgien qui obtienne le poste.
La reconnaissance des chirurgiens
La création d'une chaire de chirurgie
Le 18 décembre 1731, Louis 14 inaugure l'Académie
Royale de Chirurgie à Paris, lieu où seront formés de nouveaux chirurgiens et
où de nouvelles techniques seront mises au point.
Le 23 avril 1743, il rétablit l'égalité hiérarchique entre
médecins et chirurgiens sous l'impulsion de son premier chirurgien Germain
Pichault de La Martinière. Ce dernier dote plusieurs grandes villes françaises
d'écoles de chirurgie et crée à Paris l'École pratique de chirurgie où les
élèves peuvent s'exercer à disséquer et à répéter les opérations sur des
cadavres. Une chaire de chirurgie est créée au Jardin des plantes de
Paris et confiée à Dionos. Avec l'appui du roi, les premiers chirurgiens
(Mareschal, Lapeyronie, Lamartinière) obtiennent cinq places de professeurs
nommés par le premier chirurgien.
Triomphe des chirurgiens sur les médecins
Colère de la Faculté de Médecine, qui défile alors dans les
rues de Paris, exigeant de nommer elle-même ces professeurs et assiège ses
portes. Mais la foule vient en soutien à la Faculté de Chirurgie et les
médecins doivent se sauver après avoir été battus, arrosés de pots de chambres,
hués et humiliés.
A partir de ce moment, les chirurgiens obtiennent même
qu'on leur livre les cadavres nécessaires à leurs études sans devoir en
réclamer à la Faculté de Médecine. Malgré cela, leur nombre est insuffisant et
certains sont volés dans les cimetières ou achetés directement aux bourreaux,
ce qui provoque de nouvelles batailles avec la Faculté de Médecine, qui
n'hésite pas à faire intervenir des huissiers pour récupérer les corps ou à
provoquer de sanglantes batailles.
A la révolution, la différence entre chirurgien et médecin
est abolie. Il n'y a plus qu'un enseignement unique comprenant la médecine, la
chirurgie et les accouchements.
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